C’est lundi aujourd’hui, de Sytske Van Kœveringe, publié chez Nil éditions, 337 p. – Date de parution: 3 janvier 2019.
Je remercie les éditions Nil pour cette lecture.
Ma note: 4/5
J’ai tourné les dernières pages de ce roman ce matin et je dois dire que je l’ai trouvé absolument splendide, bien que plutôt perturbant. En tous cas, j’ai passé un excellent moment. C’est le premier roman de cette jeune femme de 30 ans, une nouvelle plume néerlandaise à suivre.
Mon avis:
Sytske Van Kœveringe, avant d’écrire ce roman, a un diplôme en image et langage… Et je trouve que cela se retrouve énormément dans son roman: L’auteure se sert des descriptions et des dialogues pour exprimer, entre les lignes, quelque chose de beaucoup plus profond que la vie quotidienne de Julia, 30 ans, auteure d’un roman qui a fait un « flop », est solitaire, récemment séparée et femme de ménage pour gagner sa vie.
Julia observe ceux chez qui elle va travailler. Et parfois, elle se sert à manger ou prend un bain. Le lecteur est porté d’appartements en maisons, fait face à des personnages uniques en leur genre et se perd dans les pensées de la narratrice. Et petit à petit, les limites entre la réalité et les désirs de Julia se confondent, sa réalité s’effrite: est-elle entrain de perdre pied? De délirer? De rêver? Le lecteur a bien du mal à faire la part des choses. Il devient comme Julia. Rapport à la réalité altéré pour tous.
Julia nous apparaît alors comme une jeune femme au bord du burn-out, qui tient tant bien que mal grâce à l’alcool et peu importe le mal de tête post-sieste. Elle ne dort plus la nuit, a parfois un rapport plutôt boulimique à la nourriture. Le ménage? Ça occupe son esprit, ça l’empêche de ruminer. Et puis, ça rythme ses journées, lui donne une raison de se lever.
J’ai beaucoup apprécié cette lecture, rythmée par une écriture brute et sans sentiment, à l’image des ressentis de Julia face aux employeurs qu’elle rencontre. Ce n’est pas tant l’histoire qui m’a le plus plu, mais plutôt ce magnifique exercice de style littéraire que nous propose Sytske Van Kœveringe. Evidemment, difficile pour moi de ne pas faire le rapprochement du style, avec celui de Virginia Woolf dans Mrs Dalloway dans lequel elle utilise à merveille cette technique du stream of consciousness (flux de conscience, en français, mais c’est très « moche » comme terme, je trouve!).
4e de couverture:
Julia, trente ans à peine, est une jeune femme solitaire qui gagne sa vie en faisant des ménages. En pénétrant dans leurs maisons, leurs appartements, elle se confronte à une galerie de personnages singuliers dont elle va observer les habitudes et les âmes à mesure qu’elle nettoie leurs intérieurs. Mais elle va aussi perdre pied. pourquoi ne pas prendre possession de la baignoire de l’appartement 61, du salon de la 122-D, se nourrir quasi exclusivement de chips chipées ou déguster une bouteille de rosé sur une terrasse qui ne lui appartient pas?
Sytske Van Kœveringe nous offre avec C’est lundi aujourd’hui un premier roman envoûtant et insolite. En mettant en scène une femme de ménage pour qui la réalité s’effrite, dans une langue saccadée qui empêche tout épanchement émotionnel, elle nous oblige à regarder par le trou de la serrure et à sortir de notre cocon.