La promesse, Damon Galgut. Éditions de l’Olivier, mars 2022, 304 pages.

Lauréat du Booker Prize 2021, La promesse est un roman aussi magnifique dans le fond que dans la forme.

Que vaut une promesse faite à une femme sur son lit de mort ? Quelle est la valeur de ces mots ? La valeur de n’importe quel mot ? La fille de Rachel, Amor, l’a entendue cette promesse faite par Pa à sa femme : donner, enfin, à Salomé, leur domestique noire, la maison dans laquelle elle vit sur leur propriété depuis des années. Mais lorsqu’Amor affronte le patriarche pour la lui rappeler, ce dernier la rejette en bloc. Que valent les mots d’une enfant ? Ont-ils réellement été prononcés ? Y avait-il d’autres témoins ?

Alors que l’apartheid fait rage en Afrique du Sud, cette promesse est vue d’un mauvais œil par le clan familial et, sitôt Rachel enterrée, c’est toute une famille qui se déchire en silence. Les années passent, les temps changent, les membres du clan vieillissent mais ne changent pas. Et alors que la promesse plane toujours et que les liens familiaux se sont étiolés, le domaine s’effrite et la valeur des terres décline. Pourtant, Salomé est toujours là. Dans cette bicoque que nul membre de la famille ne daignerait habiter… mais que personne n’accepte de lui céder. Personne sauf Amor, qui, malgré les années, garde cet objectif en tête. Tenir cette promesse. Accéder à la dernière volonté de sa mère.

Au fil des pages, les liens entre les protagonistes pourrissent et meurent. Tout se décompose, laissant une odeur putride et malsaine s’échapper d’entre les pages. Pourtant, il y a de la lumière dans ce texte. Un éclat qui laisse présager des jours meilleurs, qui nous fait dire que tout n’est pas perdu, qu’il peut y avoir beaucoup d’humanité dans ce bas monde.

Grâce à un style narratif maîtrisé à la perfection, Damon Galgut interroge la valeur des mots tant qu’ils ne sont pas posés sur le papier. Si rien n’est écrit, alors tout s’efface. Dès lors, encore plus que jamais, la littérature est une nécessité.

Roman brillant à l’intelligence rare, La promesse est de ces récits que l’on n’oublie pas et qui nous habitent longtemps, encore, après notre lecture.

Traduction : Hélène Papot

Résumé éditeur

1986, dans une ferme non loin de Pretoria. La famille Swart fait ses adieux à la matriarche, Rachel. Avant de mourir, Rachel a fait une promesse : léguer à Salome, leur domestique noire, la maison dans laquelle elle vit. Cette décision divise le clan et la solennité du deuil ne parvient pas à masquer les dissensions qui se font jour. Les langues se délient, les rancœurs et les convoitises s’exacerbent au point de faire voler en éclats les liens qui unissent les uns et les autres. Cette promesse doit-elle être tenue et à quel prix??

Le roman suit les Swart sur trois décennies, de 1986 à 2018. Alors que l’Afrique du Sud se transforme profondément, le racisme et la violence s’infiltrent encore partout, jusque dans la vie intime de chacun. À travers le déclin d’une famille protestante, c’est toute l’histoire d’un pays que Damon Galgut dessine en filigrane dans une langue virtuose qui nous fait entendre les voix de chacun de ses personnages.

Traduit de l’anglais (Afrique du Sud) par Hélène Papot.

Citations

« Amor pense à la ferme pour la première fois depuis longtemps. Elle a appris, a peut-être toujours su, qu’il est préférable de ne pas regarder en arrière si l’on veut avancer. Et elle n’a fait qu’avancer depuis son départ d’Afrique du Sud, ou du moins se déplacer, suivant une direction parfois incertaine, changeant de logement, de ville, de pays et de relations, le tout brouillé comme un paysage défilant en accéléré, quelque chose en moi est incapable de s’arrêter. »

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« La plupart du temps, les mots éloignent la peur. »

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