« Ce qui vient après », JoAnne Tompkins

Ce qui vient après, JoAnne Tompkins. Éditions Gallmeister, mars 2022, 576 pages.

D’abord on naît, puis, il y a tout ce qui vient après. Après ce premier cri, après que les poumons se sont gonflés pour la première fois. Mais peut-être la vie n’est-elle qu’une succession de nouveaux départs, après tout.

La vie d’Isaac, elle, s’effondre le jour où il perd son fils, Daniel, tué par son meilleur ami. Ce dernier, Jonah, ne pouvant faire face à la culpabilité se suicide laissant, à son tour, un parent endeuillé : sa mère, Lorrie. Autrefois proches, les deux parents endeuillés se fuient, le malheur de l’un rappelant à l’autre la perte incommensurable à laquelle il doit faire face chaque jour. Pourtant, une certaine forme de sérénité et d’apaisement semble possible lorsqu’Evangeline, une jeune fille de seize ans, débarque, enceinte, à grand fracas dans la vie de ces deux voisins. Malmenée par la vie, cette jeune fille est un véritable chat écorché qui, malgré les apparences, ne demande qu’à être acceptée et aimée. Une aubaine pour Jonah et Lorrie qui, noyés dans leur chagrin, voient en elle la promesse d’un avenir un peu plus doux et lumineux. Pourtant, lorsqu’ils apprennent qu’elle connaissait Daniel et Jonah, c’est tout l’équilibre précaire de la relation qui s’effondre et qui sera mis à rude épreuve, à moins que chacun ne se confronte aux souvenirs de l’autre afin de découvrir l’entière fresque de ce que furent les vies de ces deux garçons.

Que vient après le drame de la mort et de l’horreur ? Après que commence le deuil et que s’éveille la haine, l’incompréhension et la colère ?

En articulant son puissant récit autour de ces trois personnages malmenés par la vie, JoAnne Tompkins signe un récit doux-amer sur la complexité des relations humaines sur fond d’Éros et Thanatos. Si le roman peut être parfois un tantinet trop américanisé et tomber dans quelques clichés, l’histoire reste cependant très lumineuse et pleine de promesses pour ce qui vient après.

Un roman très agréable et fort addictif.

Résumé éditeur

Dans l’État brumeux de Washington, Isaac traverse seul le deuil de son fils adolescent, Daniel, assassiné par son meilleur ami Jonah. Ce dernier se suicide et le monde de sa mère Lorrie s’effondre à son tour. Il n’y a aucune explication à ce drame. Isaac et Lorrie, autrefois amis, s’évitent telles des ombres séparées par leurs pertes incommensurables. Jusqu’à l’apparition soudaine d’une sans-abri de seize ans, enceinte. Recueillie par Isaac, accompagnée par Lorrie, Evangeline devient un rai de lumière dans leur vie. Mais une révélation éclate : la jeune fille avait croisé le chemin des garçons la semaine du meurtre. Tous trois devront confronter leurs souvenirs douloureux. Car comprendre le passé est leur seule chance de pouvoir se tourner vers l’avenir. 

Émaillé de moments de grâce, Ce qui vient après est un premier roman lumineux, profondément émouvant, empli de foi en l’âme humaine.

Extrait

« Elle se demanda si c’était ça, être mère. Souffrir pour une vie qui n’était pas la sienne, brûler d’amour pour un enfant qui pouvait, sans la moindre action de sa part à elle, disparaître totalement de son champ de vision. »

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« Et il y avait le caractère effrayant de ce qu’elle-même ressentait, son impression de bonheur fragile. Elle ne le supporterait pas. Impossible. Elle n’était pas certaine qu’elle serait un jour véritablement heureuse, mais elle comprenait, avec ce minuscule aperçu, que le bonheur était une addiction, qu’on était condamné à chercher pour l’éternité ce premier et parfait apogée. Non, quoi que fût cette sensation, il fallait l’étouffer avant qu’elle prenne racine et commence à se diffuser, avant qu’elle ait besoin d’être nourrie pour ne pas la faire souffrir. »

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« Le goût des garçons », Joy Majdalani

Le goût des garçons, Joy Majdalani. Éditions Grasset, janvier 2022, 176 pages.

Ah ! L’adolescence ! Les hormones en ébullition, le corps chauffé à blanc, les neurones qui ne pensent qu’à ça, l’envie de découvertes, de corps qui se cherchent et se trouvent, parfois.

Si tu as la chance d’être un garçon, à l’adolescence, on dira de toi que c’est normal, que tu te cherches, que le corps a besoin d’exulter. Il faut que jeunesse se fasse. Mais gare à toi si tu es une fille. Petite traînée, n’as-tu pas honte de ces pensées impures ? Ton corps, ne le montre pas. Le plaisir ? Ne le prends pas. Couvre-toi, ma fille, tu n’es pas une salope !

Elles aussi, pourtant, elles ont le feu au ventre. Les filles de treize ans. Enfermées dans les carcans de leur éducation puritaine, qui leur dit que croquer les garçons, ce n’est pas bon. Pourtant, à treize ans, notre jeune narratrice ne rêve que de ça.

On n’est pas sérieux à cet âge-là. On envoie tout balader, on repousse les limites, on se gargarise d’avoir franchi les interdits. On commence à se construire une identité propre, différenciée de celle de ses parents. On tend le bras dans l’espoir de caresser l’interdit, ce continent inexploré, ce corps de l’autre qui recèle de plaisirs imaginés et inconnus.

À l’aide d’une plume crue, brutale, jubilatoire et parfois dérangeante, Joy Majdalani nous raconte les débuts de l’adolescence dans un collège catholique d’une ville jamais nommée. Beyrouth ? Peut-être. Mais finalement, peu importe. Les filles de treize ans rêvent toutes de mordre à pleine dents dans la chair des garçons. Et les injonctions qu’elles reçoivent sont toujours, plus ou moins les mêmes, où que nous nous trouvions. On n’est pas sérieux à treize ans. On envoie tout balader, surtout les normes

Un récit qui bouscule, une plume acérée qui libère, un vocabulaire qui heurte. Bref, un roman qui ne laisse pas indifférent.

Résumé éditeur

Elles sont « de bonne famille », « bien élevées. » Collégiennes à Notre Dame de l’Annonciation. Elles pourraient aussi bien être dans n’importe quelle institution d’une autre religion ou un très bon collège de la République. Elles ont treize ans, elles sont insoupçonnables. Elles n’ont que le désir en tête.
La narratrice, qui a treize ans, rêve des garçons, de leur sexe, de faire l’amour avec eux. Toutes en parlent. Il y a bien sûr la peur, que les religieuses du collège s’empressent d’entretenir en brandissant des images sanglantes de fœtus avortés, mais la peur ! Elle ajoute à la curiosité. La narratrice s’allie à la terrible Bruna. Rivale et confidente, elle sait dénicher sur Internet des garçons avec qui s’adonner à des conversations téléphoniques interdites. Bruna lui tend un piège, où elle tombe avec naïveté. Que faire ? Se rapprocher des plus belles de la classe, les Dangereuses ? Ces transgressives savent quoi faire de leur corps.… Les fâcheux peuvent bien la traiter de putain, il lui faut goûter, goûter au garçon.
Légendes, ragots, ignorances, peurs, élans, embûches, alliances, traîtrises, téléphone, Internet, tout tourne autour des garçons et de leur corps mystérieux dans un mélange de fantasmes et de romantisme. Cru et délicat, dévoilant les candeurs comme les cruautés, voici un premier roman d’une véracité implacable qui marquera.

Citations

« Les jeunes filles n’ont pas leur mot à dire dans ces grandes batailles. Elles en sont le butin. plus il est inaccessible, plus il est précieux. Nos corps servent à mesurer les prouesses guerrières des garçons. Notre corps fait résonner la geste épique de ceux qui nous conquièrent. L’épopée de leurs désirs nous a tant de fois été contée. Nous connaissons la bravoure qu’il leur faut déployer. On nous a dit d’applaudir en écoutant l’histoire du garçon qui finit par obtenir la fille. Notre rôle est de résister, puis de céder, à l’usure. »

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« Je n’étais pas une Dangereuse. Elles ont cette insolence furtive qui ne s’attire jamais de foudres. Elles ont le goût des transgressions silencieuses et jouissent plus fort derrière les portes closes. Elles ont appris très tôt ce que les brimades ont fini par me faire comprendre : pour vivre libre, il faut contenter ceux qui exercent leur pouvoir sur vous. Pour fuir les donjons les plus hauts, il suffit de tisser des cordes de mensonges. Ces filles de l’Annonciation savaient : la liberté se conquiert en levant les yeux dans le dos des surveillantes. »

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« Mon mari », Maud Ventura

Mon mari, Maud Ventura. Éditions L’Iconoclaste, Août 2021, 355 pages.

Rapidement, le lecteur se rendra compte qu’il s’agit moins d’une histoire d’amour que d’une histoire de folie, de mise en scène de chaque instant.

Parce que, voyez-vous, la narratrice aime follement son mari. Au point de se perdre elle-même, de s’effacer pour laisser place à un personnage qui, pense-t-elle, correspond en tout et pour tout aux attentes et fantasmes de son mari.

Le temps d’une semaine, Maud Venture plonge le lecteur dans le quotidien de cette femme, prof d’Anglais et traductrice, qui n’a d’yeux que pour celui dont elle est tombée éperdument amoureuse des années auparavant.

Lorsqu’elle nous avait présenté son roman dans les locaux des @ed_iconoclaste, elle nous avait dit que son postulat de départ était une question qu’elle s’était posée : à quoi ressemblerait la vie d’un couple si on s’aimait comme au premier jour, comme lors de la première rencontre ? Celle où nous tentons inlassablement de plaire, de ne pas faire d’impair, de paraître sous notre meilleur jour…

Au fil des jours, la tension monte et la folie s’installe. C’est dérangeant et déroutant. L’amour s’efface pour ne laisser place qu’à une relation mise en scène, digne d’un remake de « The Truman Show », car notre narratrice est bel et bien en constante représentation… jusqu’à la chute vertigineuse, malaisante et qui offre une tournure tout à fait glauque aux pages que le lecteur vient de tourner.

Maud Ventura nous offre un roman qui ne passera pas inaperçu, c’est certain: ça passe ou ça casse. Et nul doute que les avis seront tranchés.

Pour ma part, j’ai adoré. Et cette nouvelle plume française est à suivre de près. Il en fallait, de l’audace, pour écrire un premier roman aussi loin des convenances et de la bienséance. C’est aussi ça, la littérature, choquer et décontenancer !

L’âme humaine, ses multiples facettes et ses folies sans fin y sont disséquées à merveille … et vous savez à quel point j’aime lorsqu’il est question de folie humaine. Parce qu’à la fin, toujours cette même question : le fou est-il réellement fou ?

Alors, « Ciel, (lisez) “Mon mari” ! »

Résumé éditeur

« Excepté mes démangeaisons inexpliquées et ma passion dévorante pour mon mari, ma vie est parfaitement normale. Rien ne déborde. Aucune incohérence. Aucune manie. »

Elle a une vie parfaite. Une belle maison, deux enfants et l’homme idéal. Après quinze ans de vie commune, elle ne se lasse pas de dire  » mon mari « . Et pourtant elle veut plus encore : il faut qu’ils s’aiment comme au premier jour. Alors elle note méthodiquement ses  » fautes « , les peines à lui infliger, les pièges à lui tendre. Elle se veut irréprochable et prépare minutieusement chacun de leur tête-à-tête. Elle est follement amoureuse de son mari. Du lundi au dimanche, la tension monte, on rit,
on s’effraie, on flirte avec le point de rupture, on se projette dans ce théâtre amoureux.

Extrait

« Ses parents avaient mis Justine en garde, plusieurs fois. Mais il est difficile pour un enfant de sept ans de s’opposer à l’autorité d’un adulte; tout autant que d’identifier ses mensonges. »

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« Dans l’un des tiroirs de sa commode, sous une pile de vêtements, il choisit un survêtement avec capuche, en coton ouaté, aussi doux qu’une caresse; tout ce qu’il désirait était s’enfermer chez lui pendant des jours, sous une couverture, devant la télévision. Lire des romans, regarder des séries, ne plus répondre à ses e-mails ou à son téléphone. »

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« Ici-bas », Pierre Guerci

Ici-bas, Pierre Guerci. Éditions Gallimard, janvier 2021, 208 pages.

Le père était un oncologue respecté. Père de plusieurs enfants issus de deux fratries différentes. Aujourd’hui, alors que son cerveau est grignoté par une dégénérescence, il ne reste plus grand chose de la prestance de cet homme autrefois élégant et mystérieux aux yeux de son fils cadet, le narrateur. Ce trentenaire a décidé d’accompagner son père dans ses derniers jours, à domicile, dans la demeure que ce dernier occupait avec son épouse officielle.

Avec la dégénérescence, c’est tout ce qui faisait de son père l’homme qu’il était qui est entrain de s’envoler sous ses yeux. La fin de vie, c’est une succession de perte : le langage, la mobilité, la continence, la vitalité. Le narrateur fait face, du mieux qu’il le peut. Pour lui, c’est aussi l’ultime occasion de se rapprocher de son père, de lui pardonner ses nombreuses absences tout au long de sa vie et puis, aussi, de décrocher cette reconnaissance qu’il n’a eu de cesse de chercher chez son géniteur. Mais il n’a, comme réponse, que le mutisme incessant de son père et ses besoins d’être mis au propre.

Au fil des jours, les frères et sœurs passent en coup de vent. Tous bien trop préoccupés par leur quotidien pour s’arrêter plus de quelques minutes. A moins que ce ne soit leur façon de prendre leur revanche sur un père qui n’a jamais réussi à choisir entre ses deux familles. Malgré la présence continue du narrateur au chevet de ce vieil homme, l’absence règne en maitre au sein du foyer et du récit.

Alors, pendant que son père somnole, pendant que l’on attend une mort qui, bientôt, se fera désirer, pendant que l’on s’en veut d’espérer qu’elle arrive plus vite que prévu, le fils se questionne sur le sens de la vie, la vieillesse, la perte de repère, la mort.

Ainsi, dans cette maison où le temps n’a plus que peu d’importance, la vie et la mort s’entremêlent, se côtoient et s’apprivoisent pour finalement poser une question fondamentale : et si l’urgence de vivre, c’était aussi, et justement, de profiter des derniers instants qui nous sont donnés auprès de ces êtres aimés devenus vieux ?

C’est un premier roman à l’écriture saisissante, maitrisée à la perfection et magistrale. Malgré un sujet délicat et difficile à traiter en littérature, Pierre Guerci signe un récit empli d’humanité et d’amour pour cet homme qui, à n’avoir pas su choisir, n’aura jamais véritablement été complètement présent auprès des siens.

Résumé éditeur
Extrait

« Il y a deux manières de traiter les mourants. Ou bien nous les laissons crever seuls et alors nous aussi nous crèveront seuls quand viendra notre tour ; ou bien nous nous occupons d´eux jusqu’à la fin et d’autres feront de même pour nous. Moi je préfère la responsabilité au délaissement. »

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« Ce matin-là que nous en sortions mon père et moi, ce n’était ni soulagés, ni tout à fait morts. Sortis sans être sortis à vrai dire, puisque l’hôpital, m’avait-on assuré, nous accompagnerait à la maison. Il s’invitait, on restait dans son orbite, on ne lui échapperait plus ; j’aurais aussi bien pu pousser dans l’autre sens le fauteuil roulant que je retenais sur le petit plan incliné, après les doubles portes. De toute façon, dans quelque sens qu’on le prenne, ce plan incliné ne pouvait ni aggraver ni inverser la grande pente qui s’était amorcée un mois plus tôt, quand nous étions arrivés ici, et même deux ans plus tôt, quand ses premiers troubles de l’équilibre s’étaient manifestés. Au fond, la pente est toujours déjà amorcée, elle est simplement plus ou moins pentue, se fait plus ou moins sentir. Une seule chose est certaine : quand la fin approche, elle devient fortement concave. »

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« Africville », Jeffrey Colvin

Africville, Jeffrey Colvin. Éditions Harper Collins, août 2020, 384 pages.

C’est après plus de vingt années de recherches que Jeffrey Collins publie « Africville », roman retraçant, sur trois générations, l’histoire d’une famille noire et de leurs proches.

Si l’histoire de fond me tentait beaucoup – j’apprécie les fresques familiales – c’est surtout le sujet d’Africville qui a attisé ma curiosité. Construite en Nouvelle-Écosse – non loin d’Halifax – de toutes pièces par d’anciens esclaves afro-canadiens au milieu du XVIIIe siècle, la ville a été détruite sur ordre d’Halifax dans les années soixante. Suite à cette destruction, Africville est devenu l’un des plus grands symboles de l’oppression et du racisme que subirent des milliers d’Africains au Canada.

Au travers de ce roman, Jeffrey Colvin nous parle d’une ville dont il est impossible de se détacher, qui colle à la peau, parce que « être noir, on ne fait pas avec. On est noir, un point c’est tout. » Alors, à elle seule, Africville représente tout : les racines, les espoirs, les ancêtres, l’atavisme, les coutumes. À elle seule, elle les ramène constamment à cette construction sociale qu’ils ne seront jamais aussi bien que les blancs, quoi qu’ils entreprennent. Vous vous en doutez, j’ai beaucoup aimé cet aspect du roman.

Cependant, j’ai eu beaucoup de mal avec la construction du récit qui m’a paru assez bancale et maladroite et j’ai eu des difficultés avec l’enchainement des chapitres qui m’ont fait, parfois, perdre le fil du récit.

Ce triptyque familial me tentait beaucoup, mais je dois avouer que j’en ressors déçue et un peu confuse. Comme si l’histoire n’était pas complète, comme s’il me manquait des pages au récit, sans vraiment savoir lesquelles.

Traduit de l’anglais (USA) par Serge Chauvin

Résumé éditeur

Années 1930. Kath Ella refuse de suivre son destin tout tracé de fille de couleur et quitte Africville, un quartier fondé par d’anciens esclaves en Nouvelle-Écosse, au Canada. Après une histoire d’amour marquée par le deuil, elle donnera naissance à un fils, Omar, qui sera rebaptisé Étienne.

Années 1960. Étienne, dont la pâleur lui permet de passer pour un Blanc, vit en Alabama. Il est déchiré entre ses racines noires et la peur de perdre la vie qu’il est en train de construire.

Années 1980. À la mort de son père, Warner se lance dans une quête de ses origines, qui le mènera dans ce qui reste d’Africville mais aussi dans une prison d’État au fin fond du Mississippi.

Trois destins, trois personnages aux prises avec la réalité sociale de leur époque et les aléas de la vie. Pas de pathos ni de velléité moralisatrice. Les héros de ce roman sont des êtres vrais, de chair et de sang. En toile de fond, Africville, à la fois aimant et repoussoir, dont l’empreinte se transmet de génération en génération.

Avec ce premier roman triptyque vibrant, fruit de plus de vingt ans de recherches, Jeffrey Colvin s’impose comme une nouvelle voix de la littérature américaine, dans le sillage de Colson Whitehead et de Ayana Mathis.

Citations

« À l’époque où nul médicament ne pouvait raviver un bébé décharné, on recommandait parfois de l’étouffer. Il fallait agir, sinon l’Infortune risquait d’infecter le village tout entier. Mieux valait abréger les souffrances de l’enfant en pleine journée, lorsque les esprits malins seraient à son chevet pour boire la buée des ses derniers souffles.
Pourtant, plusieurs mères refusent de croire que les nourrissons défunts soient des enfants de l’infortune. »

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« Les détenues disent aussi qu’il faut toujours ranger une photo de famille en laissant le recto apparent, même s’il s’agit d’un parent qui vous a dénoncé à la police. »

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« La petite dernière », Fatima Daas

La petite dernière, Fatima Daas. Éditions Noir sur Blanc, août 2020, 192 pages.

Fatima est la petite dernière, la mazoziya. Ses parents ne l’attendaient pas. Elle est française. Musulmane. Pratiquante. Asthmatique. Clichoise. Elle s’appelle Fatima. Elle passe des heures dans les transports, elle est amoureuse. Elle est lesbienne. Peut-être ? Ses parents ne l’attendaient pas. C’est la mazoziya. Elle s’appelle Fatima. Elle est asthmatique. Ventoline. Hospitalisation. Test d’effort. Elle en a ras le bol. Elle voudrait respirer sans hyper-ventiler. Elle s’appelle Fatima. C’est la mazoziya. La petite dernière.

Le rythme est saccadé. Elle écrit comme elle respire, Fatima. Comme s’il y avait urgence, comme si tout pouvait s’arrêter, d’un coup, d’un seul. Elle raconte son quotidien, sa vie, ses espoirs. Le mal-être, les incertitudes. Elle raconte sa foi. Sa sexualité aussi. Elle martèle son identité, encore et encore. Comme pour ne pas l’oublier, comme pour ne pas risquer de la perdre, de s’en éloigner, de l’oublier – peut-être. Parce que, finalement, c’est une pérégrination en quête d’identité que nous livre Fatima. Elle cherche son équilibre.

Malheureusement, je n’ai pas été réceptive au contenu de ce récit. Je n’ai pas ressenti toutes les émotions dont j’avais tant entendu parler dans les retours que j’ai pu lire. Pourtant, il avait tous les ingrédients pour me plaire. Mais bon, vous savez, les goûts et les couleurs …

Résumé éditeur

Je m’appelle Fatima Daas. Je suis la mazoziya, la petite dernière. Celle à laquelle on ne s’est pas préparé. Française d’origine algérienne. Musulmane pratiquante. Clichoise qui passe plus de trois heures par jour dans les transports. Une touriste. Une banlieusarde qui observe les comportements parisiens. Je suis une menteuse, une pécheresse. Adolescente, je suis une élève instable. Adulte, je suis hyper-inadaptée. J’écris des histoires pour éviter de vivre la mienne. J’ai fait quatre ans de thérapie. C’est ma plus longue relation. L’amour, c’était tabou à la maison, les marques de tendresse, la sexualité aussi. Je me croyais polyamoureuse. Lorsque Nina a débarqué dans ma vie, je ne savais plus du tout ce dont j’avais besoin et ce qu’il me manquait. Je m’appelle Fatima Daas. Je ne sais pas si je porte bien mon prénom.

Extrait

«Mon père disait souvent que les mots c’est « du cinéma », il n’y a que les actes qui comptent.
Il disait smata, qui signifie insister jusqu’à provoquer le dégoût, quand il voyait à la télé deux personnes se dire « Je t’aime . »

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« On n’aime pas les gens parce qu’ils nous aiment en retour. On les aime. C’est tout. »

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